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La vitesse dégrade-t-elle la qualité du geste en marche nordique ?

C'est un sujet récurrent sur les réseaux, et ailleurs, avec des avis parfois tranchés, voire une source de polémiques.  Il est évident qu'une recherche de vitesse maximale sans maîtrise du geste risque de le dégrader, mais à la réflexion ça ne me parait pas aussi simple.  De quoi parle-t-on précisément ?

              

La qualité du geste.  

 C'est (de mon point de vue) celle qui répond à l'esprit initial de la marche nordique issu du ski de fond :  La propulsion grâce aux bâtons. C'est d'autant plus "beau" que c'est fluide.

Un geste de qualité se caractérise notamment par l'amplitude et la synchronisation de la gestuelle des bras et des jambes. Cela va au-delà de la réglementation FFA en compétition qui permet finalement d'éviter les pénalités, pourvu que la main passe devant et derrière la hanche (sans courir évidemment), ce qui n'est pas en soi le seul gage de propulsion.

Se propulser, vraiment, nécessite de synchroniser la pose du bâton avec celle du pied opposé (voire un peu avant) pour pouvoir exercer une vraie longue pression sur les bâtons.   

C'est plutôt rare chez les compétiteurs qui privilégient la cadence en mettant essentiellement les jambes et non les bras à contribution. C'est pourtant possible comme le montre le grand champion espagnol Pedro Roméro dans cette vidéo (Merci Roland Zede pour l'info). Mon niveau d'espagnol ne me permet de comprendre ce qu'il raconte mais les images sont bien explicites.

Celle-ci, commence par un éducatif avec un de ses comparses : une gestuelle très proche de celle de "l'école ©OTOP" (grande amplitude, pas de coudes pliés ni de "bâtons en l'air"....)



On peut d'ailleurs retrouver cela dans la rubrique des éducatifs illustrés en collaboration avec Roland Zede et Corinne Ducamp  ici : Les mutants


A contrario, la double propulsion est interdite en compétition. Or il s'agit bien d'une vraie contribution efficace des bâtons (les deux en même temps), notamment dans les montées bien pentues. C'est d'ailleurs ce qui fait bien avancer en ski de fond (nb : je n'en suis pas un spécialiste mais il suffit de regarder des fondeurs pour en être convaincu).

 

La vitesse

La notion de vitesse n'a pas de sens dans l'absolu. Pour une même personne "marcher  vite" sur 1, 5 ou 10 km  n'a rien à voir avec "marcher vite" sur un semi ou un marathon (idem que pour courir).

De plus, évidemment, en fonction des capacités physiques et techniques de chacun et de la qualité de son entrainement, à une allure donnée ce sera marcher vite pour certains et pas pour d'autres.

 

Plus on marche vite, plus le geste se dégrade ?

Pas tout à fait à mon avis. Un tel principe supposerait que la dégradation est proportionnelle à l'augmentation de la vitesse, de façon progressive. Je pense au contraire que la dégradation se fait par "rupture", plus ou moins brutalement, en fonction de trois phénomènes :

 

Biomécanique : En augmentant progressivement la vitesse, on peut maintenir la qualité du geste (amplitude et propulsion), avec un mouvement fluide bien que de plus en plus rapide, jusqu'au moment où ça "décroche" : le seuil de rupture ou la cadence ne permet plus aux bras de jouer leur rôle, faute de pouvoir tenir le rythme en amplitude. Ce sont alors les jambes qui prennent le dessus et, là, on n'est plus en marche nordique.

Je l'ai testé (chacun peut le faire) avec mon "tuto cadence et amplitude" ce lien.

  

Physique :  En marchant "vite", trop en fonction de ce que ses capacités permettent de tenir selon la distance (endurance, résistance, capacités musculaires, mauvaise gestion de l'hydratation ou de l'alimentation), il arrive un moment où on n'est plus capable de maintenir l'effort pour garantir une belle gestuelle. On peut alors s'effondrer rapidement et se contenter de marcher "comme on peut". Il est donc nécessaire de bien se connaitre pour ne pas aller au-delà de ses capacités, sur une distance donnée.  C'est aussi pour cette raison qu'en cherchant la performance avant tout, de nombreux compétiteurs optent plutôt pour une technique plus "économe" en privilégiant la cadence à une réelle propulsion pour moins solliciter le haut du corps et donc la dépense énergétique.

 

Mental :  Une belle gestuelle nécessite, au moins pendant la phase d'apprentissage, de marcher "en conscience", bien concentré sur sa technique. Il suffit de relâcher l'attention, en papotant avec les compagnons ou simplement en se laissant aller à ses pensées (difficile de rester "focus" très longtemps) pour que le geste se dégrade rapidement. 

C'est grâce à un travail de fond, à force de répétition, que la gestuelle va s'ancrer pour devenir parfaitement naturelle quelle que soit la cadence, rapide ou pas, et la durée.

Et encore, même une fois bien acquise, le maintien d'une qualité technique nécessite de répéter régulièrement ses gammes, comme pour tout sportif ou artiste, pour rester à niveau.

                                                 

Autre composante, le terrain :

Bien évidemment, tout cela s'applique toutes choses étant égales par ailleurs concernant le terrain. Il est clair de sur des singles techniques ou en dévers, des chemins boueux, des grosses montées ou descentes, la gestuelle va s'en ressentir. Mais c'est ça aussi la marche nordique : une activité de nature qui nécessite de composer avec en adaptant sa technique.

 

Alors oui, on peut marcher vite, bien et longtemps…  sous certaines conditions.

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1 Comment


Yesss Patrice,

Tout à fait d'accord avec Toi.

On ne peut dire mieux que ce que tu décris ...

Carmelo 😀

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